Le financement des startups technologiques est un enjeu majeur pour le développement économique et l'innovation. Le Québec et les Émirats arabes unis (EAU) adoptent des stratégies différentes pour soutenir ces entreprises en phase de croissance. Alors que le Québec mise sur des incubateurs comme Centech et des fonds comme Innovexport, les EAU s'appuient sur leurs fonds souverains tels que Mubadala Ventures et ADQ pour financer des startups à l’échelle mondiale. Cet article analyse ces différentes approches et leur impact sur l'écosystème entrepreneurial.
Centech, affilié à l’École de technologie supérieure (ETS) de Montréal, est l’un des incubateurs universitaires les plus performants au monde. Il soutient les startups deeptech dans des secteurs comme la robotique, l'IA et la cybersécurité. Parmi ses réussites figurent :
• Flare Systems (cybersécurité financière)
• Puzzle Medical (dispositifs médicaux)
• Ara Robotics (drones industriels)
Depuis sa création, Centech a aidé plus de 400 startups et généré plus de 2,5 milliards $ en valeur économique. En plus du soutien financier, Centech met en place un programme de mentorat et d'accompagnement pour maximiser les chances de succès des jeunes entreprises. Il collabore également avec des investisseurs privés et publics pour faciliter l’accès au financement.
Créé en 2016, le Fonds Innovexport finance les startups technologiques ayant un potentiel d’expansion internationale. Il a participé au financement de :
• Boréas Technologies (semi-conducteurs, Bromont)
• AEPONYX (télécommunications optiques)
• Botpress (IA conversationnelle, levée de 20M$ CAD en 2021)
L’impact de ces initiatives se traduit par une augmentation des exportations et de l’emploi qualifié au Québec. Un des principaux avantages de ce fonds est qu’il cible spécifiquement les startups qui ont une ambition mondiale, ce qui leur permet de croître plus rapidement et d'attirer d'autres investisseurs institutionnels.
En complément, le Québec bénéficie de la présence d’autres fonds de capital de risque comme BDC Capital et Real Ventures, qui investissent également dans les entreprises émergentes.
Le gouvernement du Québec propose des subventions, crédits d’impôt et programmes d’accompagnement. En 2019, plus de 8,3M$ ont été investis pour soutenir 34 projets d’incubation, favorisant l’accès au financement et à l'expertise. Le Québec dispose également de plusieurs mesures fiscales pour encourager les startups technologiques, comme le crédit d'impôt pour la recherche scientifique et le développement expérimental (RS&DE), qui permet aux entreprises d'obtenir des remboursements pour leurs investissements en innovation.
Le programme Startup Québec, financé par le gouvernement, soutient également les jeunes pousses par le biais de formations, mentorats et financements ciblés.
Mubadala Ventures est le bras de capital-risque de Mubadala Investment Company, qui gère plus de 280G$ US d'actifs. Ce fonds finance des startups à travers le monde, notamment :
• Crusoe Energy (IA et infrastructures cloud, USA, financement de 600M$ US en 2023)
• Moove (fintech nigériane, 76M$ US en 2023)
• TruKKer (logistique, investissement commun avec ADQ)
Mubadala co-investit souvent avec d’autres fonds souverains et investisseurs privés, renforçant son impact sur l’écosystème startup mondial. Contrairement aux fonds publics québécois, qui sont souvent limités par des contraintes géographiques, Mubadala investit à l’international, ce qui lui permet de capter des opportunités d’affaires sur plusieurs continents.
Les startups financées par Mubadala bénéficient également d’un réseau d’affaires et de collaborations stratégiques avec des entreprises établies.
ADQ adopte une stratégie mixte en finançant des startups locales et internationales. Sa plateforme DisruptAD vise à soutenir 1000 startups d'ici 2025. Ses investissements incluent :
• Okadoc (télésanté, EAU)
• Byju’s (edtech, Inde)
• Spinny (marché automobile, Inde)
ADQ attire des startups à Abu Dhabi via des incitations telles que des exonérations fiscales et des programmes d’accompagnement. L’une des différences majeures entre ADQ et ses homologues québécois est qu’ADQ cherche à attirer les talents en facilitant leur installation aux Émirats arabes unis grâce à des infrastructures de classe mondiale et des incitatifs fiscaux avantageux. ADQ investit aussi dans des entreprises locales pour stimuler l’innovation domestique et créer un écosystème technologique durable.
Le modèle québécois repose sur une forte implication gouvernementale, qui offre des garanties aux entrepreneurs, mais qui peut également ralentir les processus de financement en raison de la bureaucratie et des critères d'éligibilité stricts. Le soutien gouvernemental permet aux startups de bénéficier de financements non dilutifs (subventions, crédits d’impôt) et d’un écosystème entrepreneurial structuré, favorisant la croissance à long terme. Cependant, cette approche peut engendrer une dépendance aux fonds publics et une complexité administrative accrue pour les entrepreneurs cherchant à lever des capitaux privés.
À l’inverse, le modèle émirati est plus flexible et rapide, car il est principalement piloté par des fonds souverains qui disposent d’une grande liquidité et d’une capacité d’investissement massive. Ce modèle permet d’attirer des startups du monde entier en leur offrant des financements conséquents et un accès à un réseau mondial d’investisseurs et de partenaires industriels. Cependant, cette approche présente aussi des limites : les investissements sont souvent concentrés sur des secteurs stratégiques spécifiques (intelligence artificielle, fintech, énergie propre), ce qui peut restreindre les opportunités pour certaines startups qui ne cadrent pas avec les priorités nationales des EAU.
Le Québec et les EAU adoptent des modèles de financement différents mais efficaces. Le Québec mise sur un écosystème local intégré, tandis que les EAU utilisent la puissance de leurs fonds souverains pour investir à l’échelle mondiale.
Dans l’avenir, les deux modèles devront s’adapter aux nouvelles tendances de l’innovation. Le développement de l’intelligence artificielle et des technologies propres influencera les investissements futurs, et il est probable que les fonds québécois et émiratis renforceront leur collaboration avec des écosystèmes internationaux pour maximiser l’impact de leurs financements.
• Larue Langlois, R. (2023). Le Centech parmi les 10 meilleurs incubateurs d’entreprises universitaires. Direction Informatique.
• Réseau Capital. (2025). Fonds Innovexport – Description.
• Reuters. (2018). Mubadala to launch $400 million European tech fund.
• Business Wire. (2022). Botpress Closes 2021 with Strong … Funding Growth.
• Sapra, B. (2021). Abu Dhabi to support 1,000 startups… with DisruptAD. Wired Middle East.